Wednesday, December 18, 2013

Arts cinétiques et optiques


L'art cinétique est une forme d'art, né dans les années 50-60, fondé sur le mouvement fictif ou réel et l'évolution des oeuvres dans le temps. Le mouvement se crée avec les intempéries tels que le vent, le soleil, la pluie, avec des mécanismes ou une personne. Les artistes vont inventer une variété de technique afin de créer le mouvement autonome de leurs oeuvres. 
Parallèlement, les artistes réfléchissent aux rapports homme-machine depuis les dernières découvertes technique et industrielles.
C'est principalement dans la sculpture que l'on va créer du mouvement, car le mouvement se fait d'abord dans l'espace. La première sculpture cinétique fut crée par Naum Gabo, il s'agissait d'une tige d'acier qui s'agitant réellement. 
kinetic construction, de Naum Gabo, 1920



Man Ray réalise également deux sculptures en mouvement grâce au courant d'air.


Abat-Jour, Man Ray, 1920

 ObstructionMan Ray, argent, 1920



Alexander Calder réalise ce que Marcel Duchamp qualifia les "mobile", c'est à dire des structures géométriques composées de fils et d'éléments métalliques animés à un mécanisme.


Untitled (mobile), Calder, 1959




Rouge Triomphant, Calder, 1963.
Les artistes jouent aussi avec la lumière:

Your Concentric WelcomeOlafur Eliasson,  2004

Bruno Munari invente des "machines inutiles" fonctionnant avec le mouvement de l'air.


 La Machine inutile Max Bill, Bruno Munari, 1933-1993. 

mini documentaire sur Schöeffer: ici
Voici quelques autres vidéos montrant des oeuvres de Nicolas Schöeffer, baissez le son!

-Nicolas Schöffer, Chronos 5, 1960, baisser le son!   

-Lux 13 variations, Nicolas Schöffer:




Op art et art optique:

Dans la continuité de l'art cinétique, le mouvement peut aussi se faire en 2D grâce aux arts optiques. 
Au milieu du XXème siècle, les artistes vont créer des illusions d'optique grâce au contraste entre le noir et le blanc qui va faire naitre une mouvement irréel dans leurs oeuvres, ainsi que du volume. En fait, elles sont dues aux réactions sensoriels de la rétine et du cerveau. 

Parallèlement, au début du XXème siècle, en Allemagne, beaucoup de théoriciens se s'ont interressés aux théories de la perception comme aux principales lois de la Gestalt ("forme" en allemand). 
-La loi de proximité indique que les éléments proches entre eux paraissent faire partie d'un même groupe.
-La loi de similarité dit que les éléments qui se ressemblent paraissent se regrouper.
-La loi de fermeture dit que notre perception visuelle a tendance à compléter les figures incomplète.
-La loi de continuité indique que que les éléments rapprochés paraissent être les uns à la suite des autres .
-La loi de symétrie montre que celle ci inspire la cohérence, la logique.
-La loi de simplicité dit que la simplicité aussi inspire confiance et cohérence.




Voici quelques oeuvres partant sur ces principes:
Bridget Riley devant une de ses oeuvres, photographiée par John Goldblatt
Ce rapport, intitulé Hanging Zebres, huile, Victor Vasarely.

V. Vasarely1955

Mais il existe d'autres contrastes entre les couleurs, il suffit de choisir deux couleurs opposées dans le cercle chromatique. Les artistes vont donc mettre en avant les effets de la couleur sur l'homme, c'est à dire les impressions sensibles et optiques qu'elles créent, ce qu'elles expriment (ex: le rouge donne chaud et éxcite), et leurs côtés symboliques (ex: le vert représente la nature, et la permission).



Le mouvement peut se créer aussi dans les illusions d'optiques géométrique, basées sur les relations entre des formes simples.


Rotsnake



Cartella Nr. 89. OriginalAlberto Biasi, 1970



 Double métamorphose IIIYacoov Agam, 1968 
Jesús Rafael Soto
Composition cinétique IVYvaral 
BLUE ILLUSIONYouri Messen-Jaschin, huile, 2013.

Certain de ses artistes de Op art vont se regrouper dans un collectif, le Groupe de Recherche d'Art Visuel (GRAV) et remettre en question le statut de l'oeuvre et la place du spectateur. Ils publie un manifeste intitulé "Assez de mystifications" où ils expliquent qu'il est dommage que les oeuvres ne doient pas être touchée ou approchées de trop près car cela empêche l'interaction plus approfondie entre l'art et le spéctateur: 
« Nous voulons intéresser le spectateur, le sortir des inhibitions, le décontracter.
Nous voulons le faire participer.
Nous voulons le placer dans une situation qu'il déclenche et qu'il transforme.
Nous voulons qu'il s'oriente vers une interaction avec d'autres spectateurs.
Nous voulons développer chez le spectateur une forte capacité de perception et d'action. »

Dans le cinéma, L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot Bande joue les perceptions visuelles grâce à des jeux de lumière et aux effets spéciaux :
bande annonce:


extrait connu:



et en voici une autre, avec quelques extraits du films laissés tels quel et la musique de Deerhunter (un groupe super):


Wednesday, December 4, 2013

La question du monochrome


Le monochrome  signifiant "une seule couleur" est survenu à différentes époques. C'est une pratique artistique, rejetant l'art traditionnel et dont le principe est de réaliser une oeuvre à partir d'une seule couleur,  nuance et valeur. Il en existe de toutes sortes au niveau des tailles, de la brillance, des couleurs, de la texture et des matériaux utilisés.

Les monochromes apparaissent d'abord dans quelques ouvrages illustrés de la fin du XIXeme siècle: 

En 1854, Gustave Doré publie l' Histoire pittoresque, dramatique et caricaturale de la Sainte Russie, un pamphlet à visée politique et comique, dans lequel le graphiste se moque de l'histoire de la Russie. Dans l'ouvrage, qui ressemble à une bande dessinée, on peut repérer certaines vignettes entièrement blanches ou noires, ainsi que des taches rouges qui illustrent le texte. 










En 1897, Alphonse Allais sort Album Primo-avrilesque, un ouvrage bibliophilie comprenant septs aplats monochromes, format à l'italienne (14,5 x 7 cm chacun), illustrant des jeux de mots. Je vous invite à les voir tous en cliquant ici.






Yves Klein, en 1954, révèle son intérêt pour le monochrome dans son ouvrage parodique Yves Peintures, dont la préface, signée Pascal Claude, est composée de lignes noires à la place du texte. Les monochromes sont des rectangles unicolores découpés dans du papier et collés avec une mention en bas de la ville dans laquelle il a été fait et d'une signature de l'artiste. 



En peinture, selon Kasimir Malévitch, peintre russe suprématie, le monochrome Carré noir sur fond blanc représente un passage vers l'infini, l'essentiel, l'absolu, le sacré. Il ira plus loin en intégrant dans un monochrome blanc, un autre monochrome blanc. L'idée étant de rendre visible l'invisible. Mais proprement dit, ce ne sont pas vraiment ses deux oeuvres ne sont pas de véritable monochromes car le carré noir est délimité par une bordure blanche, et dans la seconde oeuvre, il utilise deux nuances de blanc.  

Carré noir sur fond blanc (1913)

Carré banc sur fond blanc Kasimir Malevitch, 1918.



Voici d'autres oeuvres qui ne sont pas réellement des monochromes mais qui s'en rapprochent:

Les toiles de Barnett Newman ressemblent à des monochromes si l'on mettant à part ses zip (lignes verticales). 


Midnight Blue, Newman, 1970



Mark Rothko pratiquait aussi le Colorfield comme Barnett Newman. Cette technique se rapproche de l'idée du monochrome.

Untitled Mural for End Wall Rothko , 1959





A travers le monochrome, Alexander Rodtchenko recherche l'image la plus pure et universelle. Il veut libéré la couleur de toute finalité.  

Rouge pur, Alexander Rodtchenko, 1921
Jaune pur, Alexander Rodtchenko, 1921
Bleu pur, Alexander Rodtchenko, 1921

Mais revenons à Klein, très célèbres pour ses recherches de monochrome. Selon lui, la couleur seule peut profondément affecter son public, et atteindre une sensibilité pure. 

En 1956, il limite ses recherches au bleu, symbole de la pureté, de noblesse, d'espace, l'immatériel. Le bleu est une couleur qui lévite sur les murs et absorbe le spectateur. L'artiste va même concocter une résine synthétique afin de conserver aux pigments outre mer bleu, leur luminosité. Klein donne sa théorie de l'imprégnation, expliquant que le monochrome est un support psychologique et émotif, même s'il n'est composé que d'une seule couleur, peut être interprété différemment selon les spectateurs. 


Monochrome bleu (IKB 3), 1960
Pigment pur et résine synthétique sur toile marouflée sur bois
199 x 153 x 2,5 cm



En 1959, le monochrome permet aussi à Klein de matérialiser l'immatériel tels que la lumière grâce à la couleur or.


MG8 Monogold sans titre, Yves Klein, 1962
Il garde également de côté le rose, représentant la chair. 
Chacunes de ses oeuvres, bleues, roses ou or ne sont jamais les même car Klein accordait aussi de l'importance à la matière. 


Monochrome und Feuer. 1961



Robert Rosenberg  est connu pour ses White Paintings, des toiles laissées blanches qui sont à la fois des monochromes et des ready-made. Rosenberg réfléchissait à ce qu'était une oeuvre art, et à son but. Le blanc sert à refléter son environnement et les événements du monde, dès lors une oeuvre peut servir à réfléchir.
Il créera aussi une série de Black Paintings.


Robert Rauschenberg, White Painting, 1951



Ad Reinhardt suivait une tout autre logique: l'art n'exprimant rien, l'art comme rien. Provocateur, il exprime sa négation au début des années 60  avec les Ultimate Paintings, des tableaux tous noir, de la même taille, çarrés.


Ad Reinhardt suspend ses peintures (Ultimate Paintings), 1966, NY


LE groupe ZERO, né en 1957 à l'initiative de Heinz Mack, Günter Uecker et Otto Piene, rassemble des artistes très divers dont Lucio Fontana, Piero Manzoni, Yayoi Kasama, Yves Klein dont la vocation est de faire table rase afin de recréer un autre langage plastique privilégiant la série, le monochrome, l'installation et la performance.
Heinz Mark s'intéressait principalement à la lumière et au reflet. Il réalise en 1967 "Sonne des Meeres", une sorte de monochrome en aluminium dont la texture fait pensé au velours, qui évoque à la fois la lourdeur et la légèreté, le mouvement et la fixité. 

Sonne des Meeres (Rotateur de lumière, soleil de la mer)Heinz Mack, Lichtrotoren, 1967.
Aluminium, 143 x 143 x 17 cm


Enrico Castellani s'interresse au monochrome comme objet. Il réalise en 1964 un monochrome blanc en relief qui s'insère entre deux murs. 


Superficie angolare bianca n°6 (Superficie angulaire blanche n°6)Enrico Castellani, 1964


Piero Manzoni crée de peintures-sculptures sans couleur appelé Achromes en utilisant des matériaux de récupération à la manière du ready made. 

Achrome, 1961


Roman Opalka montre à travers ses monochromes blancs le temps qui passe en inscrivant un suite de chiffres avec un pinceau très fin. Dans l'oeuvre Opalka 1965/1 à l’infini, détail, il va de 1 jusqu'à 35327.

Opalka 1965/1 à l'infini, détail 3307544-3324387, 1965-1982


Pierre Soulages s'intéresse seulement au noir en tant que texture, que fond et associé aux autres couleurs. 
Il peint ce qu'il appelle de l'"Outrenoir", c'est à dire ce qui dépasse même le noir en travaillant la matière.


Peinture 202 x 453 cm, 29 juin 1979, 1979



D'autre artistes contemporains ont cherché à utilisé d'autres matériaux de base afin de faire des monochromes:

Fabrice Hyber réalise un monochrome de un mètre carré recouvert de rouge à lèvre.







Dans cette oeuvre imposante de Vincent Ganivet, intitulée MK 5, le monochrome prend tout son sens à travers sa technique de réalisation: il a été entièrement peint  à grands coups de fusées de détresse, d'où cette couleur rouge poudreuse de fumigènes. 
Vincent Ganivet, MK 5, 2010. Projection de fumigène de détresse sur toile. 2m. x 3m 


Saturday, November 30, 2013

Expressionnisme Abstrait, Tachisme et Art Informel


L'expressionnisme abstrait, aussi connu sous le nom d'école de New York, est un courant artistique abstrait américain qui apparait en 1948 et se développe pendants les années 50-60, principalement à New York. Les facteurs de ce mouvement son liés à l'influence des arts abstraits et au surréalisme français ainsi qu'à crise économique des années 30 et aux horreurs de la Seconde Guerre Mondiale.   
Suite à ces derniers bouleversements, se voyant incapable de les raconter de manière figurative, les artistes vont chercher un moyen d'exprimer ce qu'ils ont vécu. C'est alors sous une forme abstraite et avec des couleurs très variées, qu'ils vont essayer de transmettre aux spéctateurs leurs sentiments, leur ressenti et leur souvenirs.
L'artiste va s'exprimer de façon subjective et le spectateur l'interprétera comme il le voudra aussi. 

Durant cette période, on accorde beaucoup d'importance  au "geste", car c'est à travers ses traces plus ou moins violentes,  qu'on l'on pourra en sortir certaines significations. Cette forme agressive de peinture est connue sous le nom d'"Action Painting" ("peinture gestuelle"/"peinture d'action"en anglais, terme inventé par Harold Rosenberg), et c'est le fameux peintre Jackson Pollock la pratiqua le plus afin d'exprimer son mal-être et sa souffrance intérieure à travers ses coups de pinceau plutôt violents, rapides et spontanés. Il utilisera aussi la méthode du "dripping", c'est à dire la projection de peinture  sur une toile posée à même le sol. La peinture devient donc une action plutôt qu'une représentation statique. L'idée était de donner plus d'importance à la texture, à la matière et aux gestes. Il y a une véritable recherche plastique.


J.Pollock - Action Painting


peinture à l’huile, Pollock, 2,375m x 3937m


Autumn Rhythm, Pollock, 1950, Metropolitan Museum of Art


Robert Motherwell utilisa cette même technique en privilégiant le blanc et le noir dont les symbolismes sont forts: le noir pour la mort, la peur et le blanc pour la vie, la joie. 


Elegy to the Spanish Republic, Motherwell, No. 57, guile sur toile, 1957-1960.
Franz Kline et ses toiles (1910-1962)

HousatonicArshile Gorky, 1943. 

Apparaît aussi la technique du "Colorfield" ("champ coloré" en anglais), terme inventé par le critique d'art américain Clement Greenberg en 1962, qui consiste à mettre en avant la couleur en l'appliquant uniformément sur une toile. La couleur vient alors engloutir le spectateur.

Les premiers artistes à employer ce procédé sont Clyfford Still, Mark Rothko et Barnett Newman. Chacun le faisait à leur manière. Still commença avec des aplats de couleur épais délimité par des contours irréguliers, Mark Rothko travaillait avec des formes rectangulaires, et Barnett Newman inventa les "zips", c'est à dire des coupures verticales divisant sa peintures en plusieurs plans de couleurs.

Rothko : « nous voulons réaffirmer le plan du tableau. Nous sommes pour les formes plates parce qu’elles détruisent l’illusion et révèlent la vérité. »


1957 J No. 2 (PH 401) , Still, huile sur toile, 1957
No. 3/No. 13 (Magenta, Black, Green on Orange), Rothko, huile sur toile, 1949,
216.5 × 164.8 cm. 
Vir Heroicus Sublimis Barnett Newman, au MoMA.


En europe, il existe à la même époque, un mouvement similaire : Le Tachisme qui se caractérise par des projections, des coulures et des éclaboussures de peinture sur les toiles.


It's All Over The City,Wols, 1947.

 UntitledJean-Paul Riopelle, huile sur toile,1951, 54 x 64.7 cm 

On retrouve également un aspect calligraphique dans les oeuvres d'Henri Michaux.


Sans titre Michaux, Peinture à l'encre de Chine, 1961-1962, 74 x 104 cm

Ce terme de "tachisme" a d'abord été utilisé péjorativement pour designer les tâches de couleurs.

L'art informel désigne toutes tendances abstraites apparaissant après la Deuxième Guerre Mondiale accordant une forte importance au geste de l'artiste. Ce mouvement est proche de l'expressionnisme abstrait, de l'Action Painting de Pollock et du Tachisme européen. 
On parle notamment d'abstraction lyrique, de matiérisme et de spatialisme.

L'abstraction lyrique désigne toute forme d'abstraction qui n'est pas géométrique, qui rompt avec les principes du cubisme et du surréalisme, et rejette l'équilibre, la rigueur des formes ainsi que l'harmonie dans la composition. Les oeuvres sont donc déstructurée, inattendue, improvisée et la maladresse de l'artiste est accepté.

Le matiérisme concerne la peinture abstraite réalisée en accumulant des matières non traditionnelles qui vont donner de l'épaisseur et de la texture à l'oeuvre. Les artistes vont se mettre à ajouter en plus de la peinture, des pâtes, du sable, des tissus enduits, du bois, du métal, des déchets, du plastique, ect.. 
Paysage à l'auto, Jean Dubuffet, 1953, huile/ toile


tête d'otage, Jean Fautrier,  1944.

Dernièrement, le spatialisme est mouvement artistique fondé par Lucio Fontana et lié aux artistes rejetant le réalisme et l'abstraction contemporaine en recherchant des nouveaux moyens techniques pour développer une "art fondé sur l'unité du temps et de l'espace". 
Lucio Fontana commença avec des oeuvres monochromes qu'il maltraitait avec des trous et des incisions.
Concetto spaziale (50-B.1),Fontana, 1950, MNAM, Paris.


Il s'interesserà insite à la lumière et réalisera quelques installations utilisant la lumière de Wood, et des néons.


 Ambiente spaziale, Fontana, Triennale 1961.

Voici d'autres oeuvres spatialistes: 
spiraleRoberto Crippa (1921-1972) 1956, huile sur toile.

Mario Deluigi (1901-1978); oil on wood, grattage

Giuseppe Capogrossi (1900-1972), Surface 209, 1957, Oil on canvas, 143 x 187 cm